Un texte largement diffusé sur le net a retenu notre attention. Il expose un constat frappant : en Martinique, aujourd’hui, bien des vérités s’étiolent, étouffées sous le poids des idées répétées. Derrière le voile insidieux qui s’installe peu à peu dans l’opinion publique, se cache une réalité plus nuancée, tissée de faits chiffrés et d’histoires occultées.
Nous proposons cette analyse à nos lecteurs pour qu’ils puissent se forger leur propre jugement, à l’abri des simplismes et du bashing ambiant, souvent amplifié par une presse nationale friande de sensationnalisme. Et parce que sur cette terre qui a vu naître Aimé Césaire, Frantz Fanon, Gaston Monnerville et d’autres esprits courageux, nous avons le devoir de penser par nous-mêmes.
Présenter cet argumentaire, c’est offrir matière à réflexion, non-adhésion aveugle.
Nous vous offrons la synthèse de cet argumentaire. En voici le contenu :
Le mythe du monopole
Contrairement à une idée répandue, la grande distribution martiniquaise n’est pas contrôlée par une poignée de géants monopolistiques. Le marché compte sept groupements d’acteurs et environ 850 supérettes indépendantes. Ce paysage commercial, en constante évolution, se distingue par la rotation des acteurs et la diversité des offres, sans barrières insurmontables à l’entrée.
Marges et prix : le poids de l’insularité
Les marges pratiquées en Martinique (24%) dépassent légèrement celles de la métropole (22,9%). Cette différence reflète les contraintes insulaires : stockage coûteux, frais de transport élevés et octroi de mer. Pourtant, les bénéfices nets des enseignes demeurent modestes, entre 1 et 2%. Le coût d’acheminement, qui représente jusqu’à 37% du prix final, pèse lourdement sur les ménages.
Le soutien financier de l’État
La contribution budgétaire de la France à la Martinique s’élève à 6,8 milliards d’euros, complétée par 700 millions de dépenses fiscales. Cependant, un déficit de 4,4 milliards d’euros persiste, soulignant un déséquilibre préoccupant entre recettes et dépenses.
Gestion locale : l’enjeu des finances publiques
Malgré une forte capacité d’autofinancement, la Collectivité Territoriale de Martinique (CTM) peine à équilibrer des dépenses de fonctionnement élevées avec des investissements en recul. L’octroi de mer représente une charge annuelle de 949 euros par habitant. Par ailleurs, les communes, endettées, disposent de marges de manœuvre limitées pour investir.
Déclin d’une emprise économique supposée
Le rôle économique des békés, souvent surestimé, s’élève à 11% du PIB et 8% de l’emploi en 2018. Quant à leur présence foncière, elle couvre 17,3% de la Surface Agricole Utile, bien loin des 52% fréquemment avancés.
Chlordécone : une responsabilité partagée
La pollution au chlordécone n’est pas exclusivement le fait des exploitants békés. Avec 35% des terres agricoles contaminées, c’est toute l’île qui en subit les conséquences. Néanmoins, 86% des personnes testées ne dépassent pas le seuil de contamination, nuance rassurante dans un dossier longtemps dominé par la crainte.
Héritage et indemnités d’esclavage
Les békés d’aujourd’hui ne sont pas tous les descendants directs des anciens esclavagistes. Une part importante des indemnités versées après l’abolition a bénéficié à des créanciers métropolitains et à des propriétaires de couleur. L’histoire refuse les raccourcis faciles.
En conclusion
La Martinique, terre de mémoires et de résonances, réclame une lecture patiente et éclairée de ses réalités. Entre fictions commodes et vérités complexes, le chemin de la connaissance demeure exigeant. Que chacun, dans la clarté de sa conscience, s’engage à peser le pour et le contre, et se donne le courage de chercher la vérité, malgré les difficultés de la complexité.
Gérard Dorwling-Carter.
Un commentaire
Le texte de 10 pages, à propos duquel Gérard Dowling-Carter propose une synthèse est un document qui fera date, sans nul doute. Il présente, de manière concise, le contre-point sur 10 affirmations, souvent reprises par les médias “officiels” et sur les réseaux sociaux.
On peut en penser ce que l’on veut et il serait salutaire que ceux qui ne partagent les informations qui y figurent s’expriment, de la même manière, c’est-à-dire sans haine, sans insultes et sans violence.
Que les békés ne soient pas tous des descendants de colons esclavagistes est une évidence.
Mais quand bien même ils le seraient, cela donne t-il le droit à d’autres martiniquais dont, parmi les ascendants, il y a pu y avoir des hommes et des femmes de couleur libres, propriétaires d’esclaves, de conspuer le mariage de la fille de Stéphane HAYOT, cela rend il légitime et juste de rendre les békés d’aujourd’hui, responsables et même coupables du fait que leurs ancêtres aient été esclavagistes, il y aura bientôt 180 ans? Dans ce cas, devra t-on faire le même sort aux actuels descendant des libres de couleur?