Antilla, pour que cette affaire soit jugée sur pièce par nos lecteurs, offre à la lecture, l’intégralité de cet article du journal libération :
« Marges exorbitantes, opacité financière, entorses à la concurrence… Alors que le géant GBH est pointé du doigt dans la crise sociale contre la vie chère aux Antilles, «Libération» a pu consulter des dizaines de documents internes qui mettent en lumière l’ampleur de ses bénéfices réels. Très loin des discours officiels.Ses comptes ont été discrètement publiés juste avant Noël, pour la première fois depuis six ans. Un revirement notable pour GBH, le groupe le plus puissant d’outre-mer, omniprésent dans la grande distribution, le secteur automobile, l’industrie et l’agriculture, surtout connu pour son opacité financière. Assigné quelques mois plus tôt devant le tribunal de commerce par quatre lanceurs d’alerte soucieux de faire la lumière sur ses véritables profits, l’entreprise au chiffre d’affaires d’au moins 4,5 milliards d’euros a donc pris les devants et choisi de faire acte de transparence. Mais une transparence toute relative. Seuls les comptes sociaux du holding ont été publiés, et non les comptes consolidés incluant ses innombrables filiales, comme l’exige pourtant la loi, et sans lesquels il est impossible de prendre la mesure des bénéfices réalisés. Un flou d’autant plus controversé que le groupe est régulièrement pointé du doigt pour son rôle dans la crise sociale contre la vie chère aux Antilles.
Son fondateur, Bernard Hayot, 90 ans, un béké (blanc créole descendant des colons esclavagistes) martiniquais devenu richissime après avoir commencé dans la vente de poulets, a cristallisé la colère lors des graves tensions qui ont agité son île natale ces derniers mois, sur fond de pillages et de magasins incendiés. Dans un protocole signé mi-octobre avec la collectivité territoriale pour tenter d’apaiser la crise, l’entreprise s’est engagée à réduire de 20 % le prix de 6 000 produits vendus dans ses hypermarchés. Mais cet accord, conclu en échange d’une baisse de la fiscalité consentie par l’Etat, est loin d’avoir satisfait le collectif citoyen à la tête de la contestation, le Rassemblement pour la protection des peuples et des ressources afro-caribéens, qui a refusé de parapher le texte.
Plus encore que les prix, c’est le flou entretenu par GBH autour de ses marges réelles qui irrite le plus les acteurs locaux. En attendant la prochaine audience devant le tribunal de commerce de Fort-de-France, le 23 janvier, Libération a pu s’entretenir avec un des protagonistes de ce système, dont le témoignage inédit permet de mieux comprendre les méthodes de l’entreprise et ses marges exorbitantes. Marc (1) travaille depuis près de vingt ans dans la branche automobile du groupe, qui représente à elle seule près de 40 % de son chiffre d’affaires global. S’il a accepté de parler, c’est parce qu’il ne se sent «plus en adéquation avec les valeurs de GBH», lassé d’être confronté au quotidien à la «souffrance financière» de clients qui n’ont pas d’autre choix que d’acheter au prix fort, fixé par le distributeur.
Position hégémonique dans plusieurs territoires
Son témoignage est d’autant plus éloquent que le cadre supérieur a accès aux informations partagées par le «board» et le club très fermé des 170 plus hauts cadres de ce groupe qui compte plus de 16 000 salariés. Cette place privilégiée «dans le secret des dieux» lui permet d’avoir accès aux discussions stratégiques et aux données les mieux gardées. «Celles auxquelles la plupart des salariés n’ont pas accès, précise-t-il. La consigne est de ne divulguer aucun chiffre à personne, pas même à nos équipes.» Pour appuyer son propos, Marc a permis à Libération de consulter des dizaines de documents internes : comptes d’exploitation, prix d’achat, marges, taux de rentabilité…
Les tendances qui en ressortent sont édifiantes : sur chaque vente de véhicule de marque Dacia, Renault ou Hyundai, les concessions de GBH réalisent une marge nette comprise entre 18 % et 28 %, soit trois à quatre fois celles pratiquées en métropole. En clair, pour un modèle vendu aux alentours de 20 000 euros, une concession peut gagner plus de 5 000 euros net, même après les éventuelles promotions et efforts commerciaux.
Ces documents traduisent aussi la position hégémonique du groupe dans plusieurs territoires d’outre-mer, où il détient plus de 50 % des parts de marché sur la vente de voitures aux particuliers, selon les chiffres que nous avons pu consulter. «Quand vous avez plus de la moitié du marché, vous faites la pluie et le beau temps, c’est vous qui dictez les tendances», insiste Marc.
Cette hégémonie est toutefois contestée par GBH, qui précise à Libé que ses parts de marché sont réparties localement entre plusieurs sociétés qui appartiennent certes au groupe, mais seraient «totalement indépendantes et en concurrence permanente». Un argument qui fait sourire notre source. «Lors des réunions de dirigeants, nous partageons ouvertement nos chiffres sur la rentabilité, le chiffre d’affaires, les marges unitaires, etc. explique-t-il. Il nous arrive même de nous appeler entre nous dès que les différences de prix sont trop importantes pour ne pas nous faire de l’ombre. C’est tout sauf de la concurrence.»
«Ici, on est békés avant d’être rivaux»
A l’arrivée, l’opacité est telle pour le consommateur qu’il est impossible de trouver le prix des véhicules neufs en ligne. «Si vous allez sur les sites internet des entreprises du groupe Hayot, vous ne verrez jamais aucun tarif affiché, contrairement à leurs homologues métropolitaines et aux importateurs européens», précise Marc. Une mécanique si bien huilée que même les constructeurs se font berner. Chez GBH, il serait en effet de coutume de modifier les tarifs affichés dans les concessions lors de visites commerciales des fabricants, de manière à leur dissimuler le prix de vente des voitures et les véritables marges du distributeur. «On mentait éhontément aux constructeurs alors que les relations avec eux sont généralement basées sur la confiance,poursuit le cadre. C’est à ce moment-là que j’ai compris que ça allait trop loin.»
Pour justifier de telles différences de prix avec la métropole, l’entreprise met systématiquement en avant les «frais d’approche» qui comprennent tous les coûts liés à l’acheminement des véhicules depuis le continent, notamment les charges liées au transport et à l’octroi de mer – une fiscalité propre aux biens importés dans certains territoires ultramarins. Mais les nombreux tableaux internes consultés par Libération montrent que ces surcoûts sont loin de justifier à eux seuls les écarts de prix. Pour une voiture vendue par GBH, le transport, l’octroi de mer et la TVA (plus faible en outre-mer voire inexistante en Guyane et à Mayotte) représentent en moyenne entre 15 % et 20 % du prix de vente final, soit à peine le taux de TVA pratiqué en métropole. En clair, contrairement aux affirmations de la multinationale, les frais d’approche ne permettent pas d’expliquer pourquoi les voitures vendues par ses concessions ultramarines s’affichent jusqu’à plus de 45 % plus chères qu’en métropole.
«De nombreuses études, menées notamment par l’Autorité de la concurrence, ont confirmé que les niveaux de marges étaient comparables à l’Hexagone», se défend le groupe Hayot, qui rappelle que d’autres charges liées à la logistique, la gestion des stocks ou les coûts d’assurance contribuent à alourdir la note finale. Sans préciser que beaucoup de ces frais profitent en réalité à d’autres filiales du groupe. C’est par exemple le cas de certains prestataires appartenant à GBH, qui facturent la réception des voitures sur le port avant leur livraison dans les concessions de l’île. «Une myriade d’enseignes avec des noms différents appartiennent au groupe et fonctionnent comme des sociétés écrans, explique Marc. Cette structure permet d’accumuler les marges, mais aussi de ventiler les bénéfices en allégeant artificiellement les comptes d’exploitation des entités les plus rentables.»
En outre-mer, cette concentration verticale se double d’une concentration horizontale. Au-delà de la vente elle-même, l’industriel est ainsi omniprésent sur toutes les activités annexes du marché automobile : location, centres-autos, pièces détachées, etc. Avec, là encore, des marges trois fois supérieures à la métropole. «Le groupe maîtrise toute la chaîne, de la vente à l’entretien, si bien qu’il peut garder dans son escarcelle les clients qui ne viennent plus en concession mais sont toujours susceptibles de fréquenter nos entreprises périphériques, poursuit Marc. Le marché est totalement cadenassé.» Sous couvert d’anonymat, un des concurrents de GBH abonde dans ce sens et confie à Libé l’existence d’une «règle non écrite» en Martinique et en Guadeloupe. «La carte de distribution automobile est déjà établie, assure-t-il. On se répartit le marché, aucun autre acteur ne peut entrer. Ici, on est békés avant d’être rivaux. Et quand je veux débaucher un de leurs collaborateurs, je dois d’abord demander l’autorisation à la direction de GBH.»
Pratiques anticoncurrentielles
Un rapport commandé par Emmanuel Macron et remis en décembre à l’Elysée, dont une synthèse a été dévoilée mardi par le Monde, dénonce une situation «préoccupante» et préconise un changement radical du modèle économique des outre-mer qui ne profiterait qu’aux oligopoles, en particulier dans les secteurs de l’automobile et de la grande distribution. Ses auteurs appellent notamment l’exécutif à «assurer l’exercice d’une concurrence non faussée» et à «encadrer les marges arrières des distributeurs». L’an dernier, la commission d’enquête parlementaire sur le coût de la vie dans les collectivités territoriales avait déjà alerté sur la «comptabilité opaque» du groupe Hayot permettant de masquer l’accumulation de marges. Son rapporteur, l’ancien député de la Martinique Johnny Hajjar (affilié PS), est resté intarissable sur l’ampleur du scandale. «Notre commission a mis en lumière un véritable système organisé de captation économique et d’enrichissement de quelques-uns sur le dos d’une population entière», explique-t-il à Libé. Pour encourager les salariés à dénoncer des pratiques illégales, les parlementaires sont allés jusqu’à réclamer un dispositif de protection de témoins, comme pour les affaires de grande criminalité. Car les dérives oligopolistiques du secteur automobile sont indissociables de celles qui touchent la grande distribution, confrontée aux mêmes méthodes.
Depuis quatre ans, un consultant indépendant alerte sur ces pratiques anticoncurrentielles dans les territoires ultramarins, qui font flamber le prix des produits de première nécessité. Président du cabinet de conseil Bolonyocte, Christophe Girardier a réalisé plusieurs rapports pour l’Office des prix, des marges et des revenus (OPMR), un organisme composé d’acteurs publics et privés chargé d’étudier le coût de la vie dans les département d’outre-mer. «Non, la vie chère ne s’explique pas par l’insularité et les frais d’approche, explique-t-il à Libé. Ces facteurs y contribuent, mais de façon secondaire. La véritable cause tient au modèle économique propre à l’outre-mer.» Un modèle hérité de l’économie de comptoir longtemps en place dans les Antilles, lorsqu’une poignée d’acteurs monopolisaient les richesses qui arrivaient au port. «La fin de l’esclavagisme ne s’est pas accompagnée d’une redistribution de ces richesses», poursuit Girardier, qui rappelle que les esclavagistes ont été indemnisés par l’Etat français et que le pouvoir économique – notamment le foncier – reste entre les mains des békés. «GBH est le fruit de cette histoire-là.»
Le consultant, qui a eu accès à de nombreux documents comptables, dénonce surtout la pratique débridée des marges dites «arrières». Celles-ci reposent sur le fait, pour les distributeurs comme l’entreprise de Bernard Hayot, d’exiger de ses fournisseurs des remises de prix en fin d’année pour objectifs atteints. Selon le groupe, elles représenteraient seulement «5 % à 7 %» de son chiffre d’affaires et seraient systématiquement «réintégrées» dans les prix «au profit» du consommateur. «Mais toutes les investigations que j’ai pu mener démontrent que ce n’est pas le cas», assure Girardier, qui dénonce les affirmations «fallacieuses» de GBH et estime que ses marges arrières peuvent atteindre jusqu’à 25 % de son chiffre d’affaires annuel. Surtout, elles n’apparaîtraient jamais dans les comptes d’exploitation des magasins, mais seraient réparties entre d’autres sociétés. Une pratique destinée, selon lui, à minimiser la marge commerciale réelle du distributeur, comparable à celle déjà évoquée pour le marché automobile.
Ce flou a été plusieurs fois dénoncé par les pouvoirs publics. «Sans transparence sur les marges, il est impossible d’établir la vérité des prix et une concurrence saine et efficace», s’était ainsi ému l’ex-ministre de l’Economie Bruno Le Maire, en juin 2023, devant les parlementaires. Mais l’opacité demeure et les prix, eux, restent jusqu’à 40 % plus élevés qu’en métropole. Il suffit d’arpenter les rayons d’un hypermarché antillais pour prendre la mesure du gouffre. En avril, la députée LFI Mathilde Panot poste une vidéo devenue virale sur les réseaux sociaux, dans laquelle elle compare une dizaine de produits d’un hypermarché Carrefour en Guadeloupe, propriété de GBH, avec ceux pratiqués dans l’Hexagone. «Pute pute pute», commente aussitôt le directeur de l’établissement sur un groupe WhatsApp consulté par Libé. De son côté, la direction de la com s’insurge : «Nos derniers relevés de prix démontrent la pertinence de nos arbitrages, qui permettent à nos magasins d’être les plus compétitifs sur leurs marchés.»
Le «coup de trop»
Pour Christophe Girardier, un épisode incarne de façon paroxystique le poids démesuré pris par l’industriel dans la grande distribution. Fin 2019, la multinationale annonce son intention de racheter le groupe Vindemia à la Réunion, mis en vente par Casino. Mandaté par l’OPMR, le consultant conclut, à l’issue d’une longue étude, que ce rachat, «très préjudiciable pour les consommateurs», est susceptible d’avoir des «impacts majeurs» sur les équilibres économiques et sociaux de l’île. Une opération de concentration inédite, l’une des plus importantes jamais réalisées dans les territoires d’outre-mer, qui ferait mécaniquement passer l’entreprise martiniquaise de 17 % à 37 % de parts de marché dans le secteur de la grande distribution à la Réunion, totalisant environ 45 % des dépenses de consommation courante des ménages réunionnais. «Cette opération n’avait aucun sens et n’aurait jamais dû être validée au regard du droit de la concurrence», s’insurge Girardier.
Mais après avoir pointé un «risque» lié à la concentration, l’Autorité de la concurrence a fini par donner son feu vert au rachat, GBH s’étant engagé à rétrocéder quatre hypermarchés à un nouvel acteur en gage de bonne foi. Une décision confirmée par le Conseil d’Etat. Depuis, les prédictions les plus sombres de Christophe Girardier se sont toutes concrétisées, le nouvel acteur ayant rapidement frôlé la faillite avant d’être racheté à son tour par un groupe mauricien, après apuration de ses créances par les pouvoirs publics. Un fiasco qui a coûté la bagatelle d’environ 35 millions d’euros à l’Etat, quand Hayot n’a jamais été aussi prospère à la Réunion. Contacté par Libé, un ancien cadre de l’Autorité de la concurrence en poste à l’époque du rachat de Vindemia concède, sous le sceau de l’anonymat, une certaine «naïveté» de son administration, qui aurait privilégié une «approche purement comptable» à des «considérations stratégiques». La commission d’enquête parlementaire avait également pointé le manque de moyens de l’Autorité de la concurrence dans les territoires d’outre mer.
Un autre fin connaisseur de ces sujets considère le rachat de Vindemia comme le «coup de trop». Chef d’entreprise, fondateur de l’association République et développement outre-mer, Max Dubois a été choisi en 2017 par Emmanuel Macron pour piloter sa campagne dans les territoires ultramarins. A l’époque, l’homme de gauche croit encore dur comme fer au «en même temps», persuadé que le jeune candidat peut insuffler une nouvelle dynamique régionale. Après l’élection victorieuse, les deux hommes continuent de se voir et échangent régulièrement sur ces problématiques. Au point que les convictions de Dubois semblent déteindre sur celles du nouveau chef de l’Etat. En déplacement à la Réunion en 2019, ce dernier ne mâche pas ses mots sur la situation sociale : «Si la vie est chère, c’est parce qu’on n’a pas suffisamment développé la production locale et parce qu’il y en a quelques-uns, en quelque sorte, qui ont tout pris pour eux, s’indigne-t-il alors face aux caméras. Ne nous mentons pas.»
«Lobbying intense» et «connivence politique»
Trois ans plus tard, en juillet 2022, le fidèle Max Dubois est propulsé par Macron conseiller spécial du ministre délégué aux outre-mer, Jean-François Carenco, poste qu’il occupera huit mois avant d’être débarqué. De cette période, il retient surtout le «lobbying intense» de GBH, mais aussi l’absence de «garde-fous» et la «connivence politique» à l’égard de Bernard Hayot, élevé en juillet au rang de grand officier de l’ordre national de la Légion d’honneur par décret présidentiel. Le pouvoir de l’industriel est à la mesure de son entregent. «Lorsque j’étais conseiller spécial, j’ai vu Bernard Hayot venir huit fois en personne rencontrer le ministre», se souvient Max Dubois.
Rien de très surprenant tant le patriarche et ses plus proches collaborateurs ont toujours eu leurs entrées dans les cabinets ministériels, de droite comme de gauche, au fil des décennies. «J’ai observé comment ça fonctionnait de l’intérieur et j’ai compris que ça ne changerait jamais, poursuit-il. Depuis les années 70, de nombreuses lois ont tenté en vain d’encadrer le secteur. Aujourd’hui, seule une commission d’enquête parlementaire permettrait d’établir l’ampleur des collusions.» L’an dernier, Bernard Hayot a officiellement annoncé à ses équipes qu’il passait la main à ses deux fils et à son gendre, après de longues minutes de standing ovation. Mais ceux qui le connaissent savent que son fantôme rôde encore.
Max Dubois, qui continue «régulièrement» d’échanger avec Emmanuel Macron, considère désormais le Président comme «le pire de la Ve République pour les territoires d’outre-mer», sujet qui restera selon lui comme «une tache indélébile de ses deux quinquennats». Mais bien plus que la postérité du chef de l’Etat déclinant, Dubois redoute surtout que le coût de la vie ne finisse par faire dégénérer une situation de plus en plus tendue dans les Antilles. «Le point de renversement est tangible, prévient-il. Une étincelle et tout peut exploser.»
(1) Le prénom a été modifié. »
La réaction de GBH, suite à l’apparition de l’article de libération du 9 janvier 2025.
ci-dessous, l’intégralité de cette réponse :
« Fort-de-France, vendredi 10 janvier 2025
Communiqué de pressse.
Les récents articles publiés par Libération ont clairement pour objectif de déstabiliser notre groupe. Ils s’appuient sur nos détracteurs habituels et un ancien salarié qui nous dénigre et nous diffame dans un esprit de vengeance. Ces attaques instrumentalisent notre groupe. Elles sont infondées et approximatives, sans considération pour nos salariés, nos clients et nos fournisseurs.
Nos premières pensées vont vers nos collaborateurs qui sont, comme nous, choqués par la teneur de cet article. Nous ne pouvons que déplorer que le journaliste n’ait pas tenu compte des réponses précises, chiffrées et sourcées que nous lui avons adressées, pour faire suite aux questions qu’il nous a envoyées avant la parution de l’article.
Nous tenons à répondre aux deux grands thèmes de cet article.
Les niveaux de marge en Outremer
Dans la grande distribution alimentaire, nos marges sont très comparables à celles pratiquées dans l’Hexagone.
Dans l’automobile, le métier n’est pas le même que celui d’un distributeur dans l’Hexagone.
En effet, comme nos concurrents localement, nous faisons deux métiers, celui d’importateur et de distributeur. Le métier d’importateur consiste à commander, stocker, former les équipes, distribuer et mettre en œuvre la communication et la stratégie de la marque. L’entreprise finance entre 3 et 5 mois de stock pour les voitures neuves et entre 3 et 6 mois de stock pour les pièces de rechange, cela n’existe pas dans l’Hexagone. Ce métier demande donc des immobilisations financières très importantes.
Les marges pratiquées dans les DOM sont les mêmes que celles constatées à l’international pour des opérateurs qui sont à la fois importateurs et distributeurs.
Nous nous efforçons de proposer des prix les plus attractifs possibles et d’offrir un très bon niveau de service à nos clients. Si nos prix n’étaient pas compétitifs, nos clients iraient chez nos concurrents !
La concurrence en Outremer
Le marché de la grande distribution dans les territoires d’Outre-Mer met en concurrence de nombreux acteurs. GBH n’y est en aucune manière en position dominante. De nombreuses enquêtes et contrôles par les autorités de concurrence attestent de cette situation.
Dans l’automobile, les marchés ultramarins sont également très concurrentiels et suivis par les constructeurs qui défendent âprement leurs parts de marché. Dans ce contexte, notre performance commerciale ne peut se réaliser que grâce à un positionnement tarifaire agressif.
La forte contrainte sur les marges a d’ailleurs provoqué de grandes difficultés financières ces dernières années chez de nombreux acteurs de ce marché. Si on ajoute l’arrivée des nouveaux constructeurs chinois, et les nombreux cas de redistribution de portefeuilles de marques décidées par les constructeurs, on ne peut que constater que le marché n’est absolument pas figé mais bien au contraire extrêmement dynamique et concurrentiel. Ainsi en 2024, par exemple, les marques JEEP et FIAT ont changé d’importateur dans certains territoires d’Outre-Mer, dont la Martinique.
En conclusion, le problème de la vie chère est bien antérieur à l’existence de GBH et trouve son origine dans une problématique structurelle : l’éloignement. En 1952, 8 ans avant la création de notre groupe, l’État accordait déjà une prime de vie chère à ses fonctionnaires.
Nous restons mobilisés pour contribuer à trouver des solutions pour faire baisser les prix et combattre la vie chère.
Analyse du communiqué de presse de GBH du 10 janvier 2025
GBH répond à un article publié par Libération le 9 janvier 2025, qu’il accuse de contenir des informations visant à « déstabiliser » le groupe. Le communiqué se présente comme une défense contre des critiques perçues comme infondées, émises par des détracteurs récurrents et un ancien employé. L’objectif de cette réponse est de préserver l’image de l’entreprise et de rassurer ses collaborateurs, clients et partenaires.
Une attaque jugée injustifiée
Le communiqué affirme que le journaliste n’a pas pris en compte les données fournies par GBH. Cette déclaration sous-entend une défaillance dans l’éthique journalistique, sans toutefois détailler précisément les contre-arguments qui auraient été ignorés. GBH n’a pas jugé utile s’engager dans une réfutation exhaustive et détaillée en proposant néanmoins une défense sur certains points clés.
Les marges pratiquées dans les DOM
GBH défend la compétitivité de ses prix, notamment dans la grande distribution alimentaire. L’entreprise affirme que ses marges sont similaires à celles de l’Hexagone.
Pour le secteur automobile, elle met en avant des différences structurelles : le double rôle d’importateur et de distributeur, les coûts élevés d’immobilisation des stocks de véhicules et de pièces détachées (entre 3 et 6 mois).
Cette justification met en lumière des contraintes spécifiques aux DOM qui influencent les coûts, expliquant des prix potentiellement plus élevés.
Sur la concurrence dans les DOM, GBH réfute être en situation de domination.
Dans la grande distribution, GBH cite des enquêtes des autorités de concurrence pour prouver que le marché est ouvert et surveillé.
Dans l’automobile, il évoque un marché dynamique et concurrentiel où les constructeurs chinois augmentent la pression sur les parts de marché.
Il cite des exemples récents de redistribution de marques, notamment le changement d’importateurs pour JEEP et FIAT en 2024, pour illustrer l’évolution rapide du marché.
GBH rejette l’idée que son rôle contribue à la « vie chère » en Outre-mer, attribuant le problème à des facteurs historiques et structurels, notamment l’éloignement géographique. Il mentionne que l’État français accordait déjà des primes de vie chère en 1952, avant la création du groupe.
Sur la compétitivité des prix et marges GBH affirme que ses prix sont compétitifs et que ses marges restent alignées avec celles de l’international, mais n’a pas jugé utile dans communiqué de révéler des donnée chiffrée pour corroborer ces affirmations, estimant certainement qu’un organe de presse n’a pas à se substituer aux organes de l’État pour exiger des preuves tangibles de ces affirmations.
Le communiqué montre une attitude de solidarité envers les collaborateurs, qui SOS les assauts d’une opinion instrumentalisée pourrait perdre confiance en leur dirigeant.
L’absence de preuves détaillées et la minimisation des critiques risquent de ne pas suffire à convaincre un public déjà sensibilisé aux problématiques de cherté de la vie en Outre-mer. GBH en bon stratège n’ignore pas ce fait, mais à l’évidence souhaite conserver une certaine « distance » avec cet organe de presse ou tout autre journal pour qu’il soit bien établi que le groupe n’a nullement l’intention de s’engager dans un dialogue faussé à la base, ni non plus semble-t-il tirer parti des imputations de cet article qui peuvent être considérées comme diffamatoires, en portant atteinte à l’honneur ou à la réputation du groupe. En droit français, la diffamation est définie comme l’allégation ou l’imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la réputation d’une personne. Les accusation de “marges exorbitantes” et de “pratiques anticoncurrentielles” : insinuent que le Groupe Bernard Hayot se livre à des pratiques commerciales illégales ou immorales, ce qui nuit à sa réputation.
L’utilisation du terme “Opacité financière” : peut faire penser que l’entreprise cache délibérément des informations financières, ce qui pourrait être perçu comme un comportement malhonnête.
Les Imputations faites par le témoignage de Marc, ce cadre supérieur sur des pratiques internes, telles que la modification des tarifs affichés ou le “mensonge” aux constructeurs, peuvent être considérées comme diffamatoires si elles ne sont pas prouvées. On notera que pour une accusation aussi grave, le journal la libération semble se contenter des déclarations d’un employé évincé du groupe, ce qui semble assez « léger »
La mention de “captation économique et d’enrichissement de quelques-uns sur le dos d’une population entière” : peut être vu comme une accusation grave qui sous-entend que l’entreprise profite de manière immorale de la situation économique des consommateurs. Ce sera donc aux services de l’Etat de faire le travail des éclaircissements sur ce point fondamental.
Il s’agirait de”Véritable système organisé” : Qualifier les pratiques de l’entreprise de “système organisé” donne une connotation pénale à ces opérations, ce qui la aussi devrait entraîner l’intervention des services de l’État,
La traditionnelle référence aux “békés” et à l’héritage esclavagiste qui fait partie de notre contexte socio-culturel, de stigmatisation d’un groupe en raison de son histoire, et de plus en plus reprise par la presse nationale, ce qui a l’évidence va de plus en plus détériorer le « vivre ensemble » des Martiniquais.
Gérard Dorwling-Carter