Symbole de la richesse et de la liberté de la ville, un carillon longtemps associé à un beffroi aujourd’hui disparu sonnait toutes les heures dans la capitale bretonne. Rabelais en fait référence dans Pantagruel en 1532.
Haut dans sa verticalité de 45 mètres (soit 15 étages) et doté d’une cloche de 18 tonnes, l’édifice sonore fut détruit lors du grand incendie de Rennes.
Cette Tour verticale transformée en beffroi au XVème siècle était dotée d’une horloge à automate assez unique. Toutes les heures, l’automate représentant Saint- Michel sortait pour terrasser le dragon au son du carillon. L’horloge marquait le temps et rythmait la vie des habitants.
La quête d’infini et l’aspect intangible de la mesure du temps ont favorisé philosophiquement des réseaux de missionnaires ou marchands d’Outre-mer à devenir les meneurs d’autres aventures audacieuses comme par exemple la Compagnie des mers orientales créée par la compagnie de marchands des villes de Laval, Saint-Malo, et Vitré en 1601.
Un tel pari trouve des rapprochements avec le sillage historique d’audacieux collectionneurs et voyageurs partis entreprendre des voyages ou explorations vers l’Asie.
« Au Carillon » est un autre pari fait de persévérance, de créativité, de dextérité et de patience. Un chemin entrepris par Marie Jouet née le 6 février 1897 et décédée le 9 août 1984 à Saint-Malo, à l’âge de 87 ans.
Son aventure a commencé avec son époux Charles dans la rue Duguesclin de Vitré vers 1919-1920 avec comme point de départ une réflexion prospective : Quel leviers entreprendre face au risque qu’une population perde l’habitude d’acheter du beau de qualité ?
Au cœur d’un campus des métiers à ciel ouvert sur les Marches de Bretagne, le commerce de détail d’articles de joaillerie s’appuyait historiquement sur des activités d’assemblage de bracelets de montre. Par exemple, Les Ateliers de Vitré étaient devenus un sous-traitant de référence pour les grands acteurs du luxe français. Riche de son bassin industriel, Vitré a développé des liens avec la « vallée du bijou » ardéchoise, où les ateliers Altesse fondés en 1905 employaient de véritables artisans
passionnés. Sans oublier, les îles Anglo-Normandes dont le Musée du Diamant de Guernesey rappelle les échanges transmanche. Terre d’exil de Victor Hugo, Guernesey dispose du seul Musée du Diamant des îles britanniques, niché en toute sécurité dans l’ancien coffre-fort des banquiers John Tanns. Imprégnée d’histoire et de mystère, l’histoire de cette pierre précieuse « invincible » est pleine d’intrigues, de scandales et de superstitions. Mais aussi de transferts d’innovation avec le savoir-faire horloger.
Marie et Charles Jouet étaient les propriétaires de la bijouterie horlogerie « Au Carillon » jusqu’en 1959. Ils ont tenu cette bijouterie pendant 40 ans et habitaient au- dessus de celle-ci. Le métier de bijoutier était une histoire de famille : le père de Charles Jouet était bijoutier et le couple avait des neveux qui tenaient plusieurs établissements à Saint-Malo et dans la baie du Mont-Saint-Michel.
Après avoir vendu leur affaire en 1959, Marie et Charles Jouet se sont retirés à Saint-Malo où ils ont acheté une propriété sur la digue de Paramé, près de l’emplacement historique du pavillon des Indes, le Taj Mahal breton.
L’ouverture sur l’Orient en relation avec plusieurs marchands d’art a été sans doute la clé du succès de leur entreprise en particulier pour s’intéresser à l’exploration des savoir-faire artisanaux et des voies d’innovation autour des matériaux comme le verre.
Les carillons à vent ne représentent-ils par l’harmonie et la quiétude venues des peuples d’Asie et du Pacifique ? Le verre comme matériau rare et fragile leur donne une tout autre dimension esthétique et philosophique. Ondulé, coloré, un carillon en verre devient merveilleux quand le soleil brille.
C’est aussi le souvenir rapporté d’un voyage ancien à la confluence de la Mer de Chine, du Japon et l’Extrême-Orient, au carrefour des cultures chinoise, japonaise, polynésienne et même européenne avec les comptoirs historiques hollandais et espagnols dans le détroit de Taiwan.
L’aventure technologique de la réalité virtuelle souligne combien le verre peut continuer à développer un fanion créatif à la surface de pôles d’innovations en Asie pour réinventer d’autres aventures tournées vers les grands enjeux de notre époque, nourries des proximités philosophiques des peuples et de leurs traditions créatives.
Kevin LOGNONÉ