Karine Thérèse, professionnelle de santé et militante écologiste, se présente aux élections pour défendre les valeurs humanistes et environnementales en Martinique. Elle aspire à améliorer la santé, l’éducation, et la transition énergétique sur l’île. Cette podologue de 40 ans se présente en tant que candidate pour la circonscription du sud de notre île.
Pouvez-vous vous présenter ?
Je suis Karine Thérèse, professionnelle de santé de 40 ans. Je m’intéresse à la politique depuis que je suis étudiante. Je ne me suis jamais sentie aussi martiniquaise que pendant mes études. J’ai été sollicitée pour candidater aux élections de la CTM en 2021. J’ai ensuite participé aux législatives de 2022, pour la 4ème circonscription de la Martinique, sous l’étiquette d’Europe Ecologie les Verts. En 2023 j’ai été la suppléante d’Edouard Tinaugus (divers gauche) pour les sénatoriales. Actuellement, je suis à la tête du comité “Utiles” de Martinique. Je prône des valeurs humanistes, qui ont pour but de pousser à prendre soin du vivant. Nous devons défendre notre environnement afin de pouvoir mieux vivre entre nous. Il y a beaucoup de candidats du comité auquel j’appartiens dans toute la France. Nous nous engageons à nous battre ensemble, afin de défendre nos valeurs !
La Martinique s’efforce de mettre des moyens en place pour rattraper son retard en termes de transition énergétique. Si vous êtes élue députée, quel sera votre rôle ?
Nous ne devrions pas avoir des taxes similaires à celle de la France, sachant que nous sommes dépendants du fioul de l’Atlantique. Il est nécessaire de s’intéresser à son utilisation, mais pas seulement. Nous avons la chance de pouvoir jouir d’autres formes d’énergies, telles que celles que produisent les vagues, le solaire ou encore la géothermie. Il est crucial de valoriser ces points, beaucoup plus que le reste.
Quels sont vos projets, à propos de l’amélioration des services de santé de notre île ?
Il y en a plusieurs. Sur notre territoire, les professionnels de santé se raréfient, car l’activité médicale est contraignante. A cause de plusieurs problématiques tels que le déremboursement progressif ou encore la déresponsabilisation de la sécurité sociale, les gens ont de plus en plus de mal à pouvoir se soigner correctement. Tout d’abord, par le biais du plan “Grand âge”, nous avons pour objectif d’améliorer les services à la personne. Nous comptons apporter un statut particulier aux auxiliaires de vie, afin de valoriser leur travail. Avant les élections, je travaillais d’ailleurs sur un projet d’indexation du remboursement de la sécurité sociale, par rapport au taux de pauvreté sur les territoires. Mon but est de faire en sorte que le service de santé puisse s’adapter localement. Je souhaite aussi mettre en place un retrait de l’octroi de mer sur les produits de santé.
Que prévoyez-vous pour améliorer le système éducatif de la Martinique, sachant que c’est un système qui défavorise à la fois les enseignants et les élèves ?
Il est convenu de mettre en place des dispositifs bien spéciaux. Il est temps de revaloriser le statut des AESH (accompagnants d’élèves en situation de handicap). Il serait aussi intéressant de faire en sorte qu’il y ait des programmes spécifiques liés à la culture du territoire. Il faut revaloriser les moyens mis à disposition des élèves tels que les outils numériques. En tant que députée, je souhaite pouvoir agir pour qu’il y ait des amendements afin de favoriser la mise en place de ce genre de dispositif.
Pourquoi voulez-vous traiter le thème de la baisse démographique en Martinique et quelles sont vos perspectives à ce sujet ?
Nous sommes face à une situation d’urgence : nos forces vives quittent le territoire. Les dernières dizaines d’années de politique que je qualifie de catastrophiques ont conduit à une fuite des compétences vers l’extérieur. Il s’agit là d’un défaut d’exploitation de nos ressources, y compris dans le milieu éducatif. Plusieurs étudiants se plaignent d’un manque de moyen pour pouvoir recevoir l’enseignement et travailler dans de bonnes conditions. Ces personnes choisissent malheureusement de partir en France, voire même à l’étranger. Le plus souvent, il y a très peu de chances qu’elles décident de revenir en Martinique.
Je souhaite alors améliorer le système éducatif, comme je l’ai fait comprendre précédemment, afin de valoriser la transmission culturelle. Il faut favoriser les échanges intergénérationnels, afin d’améliorer le sentiment d’appartenance et le partage du territoire. Il faut améliorer les conditions de travail de nos martiniquais pour les aider à développer leur activité mais aussi leur ancrage sur notre île. En suivant ce plan, on évitera de laisser s’échapper des compétences de haut niveau.
Il est important de faire en sorte de pouvoir recréer une dynamique et revaloriser les qualités de la jeunesse locale. Pour y arriver, il faut lui donner les moyens d’exploiter ses capacités.
Beaucoup d’environnements tropicaux sont menacés par les conditions climatiques, dans le monde. Avez-vous des projets pour préserver les forêts martiniquaises et celles du reste de l’Outre-mer ?
Absolument ! La priorité c’est la protection du littorale, avec un statut juridique pour la protection du vivant. Nous travaillons actuellement pour la création de digues artificielles aménagées avec des espèces endémiques. Cela a pour impact de limiter l’avancée de la mer sur le littoral. Cela permettra aussi de désacidifier la mer, sachant qu’il ne nous reste que 3% des coraux que nous avions il y a 100ans. Ainsi, nous pourrions éviter aux pêcheurs de devoir partir trop loin afin de nourrir la population. Mettre en place ce type de dispositif ferait en sorte de mieux protéger nos territoires, mais aussi les populations.
Certains agriculteurs ultramarins confient leurs réticences face à certaines mesures écologiques, qui mettraient selon eux en danger leurs récoltes. Quelles solutions proposez-vous afin de leur permettre d’établir une agriculture qui respecte l’environnement sans qu’elle ne nuit à leurs récoltes ?
Je propose qu’il y ait une exonération d’impôt pour ceux qui proposent une agriculture saine. Je souhaite mettre en place des formations dans le seul but de mettre à profit ces pratiques. Je suis convaincue que nous avons les moyens d’améliorer notre souveraineté alimentaire, notamment en combattant fermement la concurrence déloyale de produits qui ne sont pas au norme et qui sont importés en Martinique. Si je suis députée, je m’engage à valoriser le travail réalisé par ceux qui nous nourrissent et de ne pas laisser les traités de libre échange proposés par la Macronie et le RN prendre le dessus sur la production locale.
Beaucoup d’élus d’Outre-mer se battent contre la vie chère dans les territoires, chacun à leur façon. Quelle sera la votre ?
Premièrement, comme je l’ai dit, une réforme de l’octroi de mer, puis une utilisation de la continuité territoriale qui serait beaucoup plus complète. Il est nécessaire de mettre en place une harmonisation des prix de l’alimentation entre l’hexagone et l’Outre-mer. Il serait aussi utile qu’il y ait une meilleure utilisation des revenus des collectivités pour le service public. Si le désavantage causé par l’octroi de mer n’a jamais été aussi fort, c’est aussi le cas pour la dégradation des services publics. En améliorant progressivement l’utilisation de nos ressources financières, nous pourrions permettre à la population de pouvoir vivre plus sainement en dépensant moins.
Tout cela rentre dans le cadre de l’amélioration du pouvoir d’achat. Si on rembourse par exemple les frais de santé, en les indexant sur le taux de pauvreté, les gens auront mieux accès aux soins, ils pourront ainsi être en meilleure santé et mieux prendre soin d’eux. Ainsi, ils auront moins de dépenses liées à la dégradation de leur vie au quotidien. Il s’agit d’un projet qui est pensé à long terme qui permettrait aux gens d’avoir de meilleures perspectives d’avenir.
Propos recueillis par Thibaut Charles